Vendredi
13 février. De San Francisco de la Sierra à Laguna Ojo de Liebre
près de Guerrero Negro
Il
fait dix degrés ce matin. Nous en profitons pour allumer le
chauffage à essence 15 minutes. Il faut le faire une fois par mois
et aussi bien le faire quand il fait froid. Nous avons très bien
dormis. Dans le grand silence mis à part le chant de quelques
grenouilles et deux ou trois clochettes de chèvres au loin.
Nous
déjeunons puis partons de l'auberge-resto-camping vers 8h15. La
lumière du matin est idéale pour les photos du retour. Nous
reprenons notre mauvaise route, repassons devant la Cueva del Raton,
puis sur les corniches qui bordent le canyon, puis devant les
cirrios et arrivons enfin, 40 minutes plus tard et sans anicroche à
la partie asphaltée de la route. Un moment de bonheur! Nous
montons la petite côte d'un kilomètre et vous voici partis pour la
descente. Durant les prochains 28 kilomètres, jusqu'à
l'intersection avec la route nationale, je n'ai pas appuyé une seule
fois sur l'accélérateur. Au contraire il a fallu utiliser la
compression à plusieurs reprises pour ne pas faire surchauffer les
freins.
Nous
roulons ensuite dans la plaine désertique de plus en plus
sablonneuse. Nous sommes en plein désert de Viscaino dans la
Reserve de la biodiversité du même nom. La Sierre San Francisco en
fait partie aussi. On voit moins de gros cactus et plus de petits
buissons. Nous arrêtons en passant faire nos courses à la petite
ville de Vizcaino et continuons sur la route nationale jusqu'à une
dizaine de kilomètres avant Guerrero Negro où nous bifurquons pour
prendre la route menant à la laguna Ojo de Liebre.
C'est
une bonne route de gravier qui nous amène 24 kilomètres plus loin à
une grand baie de l'océan Pacifique et nommée Laguna Ojo de Liebre.
Ce lieu est fameux pour le nombre de baleines grises qui y
séjournent durant la migration hivernale. Pendant le mois de
janvier , il se voit près de 1500 baleines différentes dans cette
baie et près de 2500 en février. La population est en croissance
car on en voyait moins de la moitié de ce nombre il y a une
quinzaine d'années. C'est aussi un site de mise bas prisé par les
cétacés.
Pour
se rendre à la baie, il faut passer par des salines, une industrie
locale bien vivante. On nous enregistre à l'entrée et aussi à la sortie. Pourquoi? Je me pose la question. L'eau de mer
entre dans l'immense bassins par un canal. On ferme les bassins et
l'eau s'évapore en six mois environ grâce à la chaleur, au vent et
à l'absence quasi totale de précipitation. Ensuite on recueille le
sec à l'aide de machinerie lourde. On le transporte par barge sur
une île à quelques kilomètres au large où les gros bateaux
peuvent venir se charger avant d'apporter leur cargaison à des
destinations internationales.
À
la lagune, il n'y a qu'un restaurant, un quai avec quelques chaloupes
et une vingtaine d'emplacements de camping avec ou sans palapa à la
disposition des campeurs. Pour 5 $CAD par jour, nous avons
l'emplacement bien éloigné des autres sites, la palapa et un accès
à une bécosse malodorante et sale à faire peur. Pour cette
fois-ci, nous sommes vraiment contents d'avoir notre petite toilette
dans le VR.
Nous
nous installons à un site et mangeons en regardant les souffles de
baleines au loin. À l'oeil nu, j'en ai compté treize. Avec les
jumelles, j'en compte un minimum de 32 dans mon champs de vision. Il
n'y a pas de vent et on entend très bien le souffle des baleines qui
passent à 500 mètres de nous environ.
En
après-midi nous prenons une grande marche d'environ trois heures.
Nous allons prendre les informations pour l'observation des baleines
en bateau puis marchons sur la route du camping et revenons ensuite
par la plage de sable et de boue.
Il
y a énormément d'oiseaux sur la plage à marée basse :
bécasseaux, chevaliers, barges, courlis à long bec, balbuzards
pêcheurs et même une bernache cravant qui semble bien perdue toute
seule de sa gang. Un peu plus loin gît une carcasse de baleineau dont la mort remonte déjà à quelques semaines on dirait. Pauvre petit qui n'a pas eu sa chance!
En
fin d'après-midi, nous sommes entourés d'orages qui déversent des
trombes d'eau sur le désert et sur la baie. On voit même des petites
tornades qui s'élèvent devant les orages. Mais bizarrement, nous
sommes épargnés. Nous prenons une petite douche derrière le VR en
ménageant au maximum l'eau car il n'est pas possible de remplir son
réservoir ici.
Un
peu de guitare et vient ensuite le temps de préparer le souper.
Hélène, bien installée dehors nous prépare des poitrines de
poulet avec une ratatouille et du riz. On savoure notre repas en
regardant les orages qui tombent sur la baie et sur le désert
pendant que le soleil se couche. Très très spécial comme décor!
Nous
passons notre soirée à trier les photos, faire le blogue et à lire
comme à l'habitude. Le silence règne dehors, sauf pour le souffle
des baleines qu'on entend parfaitement. Il ne manque que leur petite
chanson pour nous tomber dans les bras de Morphée...
Samedi
le 14 février. Laguna Ojo de Liebre Jour 2
Nous
nous levons avec le soleil un peu avant 7h et prenons un bon
petit-déjeuner avec deux cafés. Nous prenons notre temps car il
vente un peu et il fait frais ce matin. Nous ne voulons pas partir
trop tôt pour notre excursion aux baleines.
Nous
nous rendons acheter nos billets vers 9h. Il y a tout de même une
trentaine de personnes qui attendent pour prendre un bateau. Il faut
dire que la Lagune Ojo de Liebre est très connue tant au Mexique
qu'aux États-Unis. Il y a beaucoup de tours de quelques jours
organisés à partir de la Californie et nous voyons de nombreux
campeurs en tente ce qui était rarissime plus au sud.
Nous
nous assoyons dans notre chaloupe avec deux mexicaines et leurs
enfants ainsi qu'avec Daniel et Catherine, frères et sœurs, lui du
Colorado et elle de la Californie. Il l'a rejointe à San Diego puis
ils ont roulé jusqu'ici en deux jours. Ils ont fait deux excursions
aux baleines hier et en sont à leur troisième ce matin. Ensuite
c'est le retour en un jour et demi pour rentrer à la maison. Bien
sympathiques, ils parlent même un peu français.
Nous
partons du quai vers 9h45 pour notre tour d'une heure trente sur la
Lagune. Nous avons déjà vu des baleines mais jamais autant. On ne
les a pas compté, il y en avait certainement quelques centaines
dans un horizon visible. Et ce qui est spécial, c'est qu'il y a
beaucoup de mère avec leur petit baleineau. Ils suivent leur maman,
passent par dessus, sortent la tête de l'eau, font des bonds et des
cabrioles. Vraiment génial! Mais ce qui est encore plus fort c'est
que les petits et même les mamans sont très curieux et viennent
nous voir de très près. Ils sortent parfois la tête de l'eau pour
mieux nous regarder. Ou ils s'approchent simplement et passent sous
le bateau. Le code d'éthique est respecté par les capitaines. Ils
ne coupent pas les baleines et les laissent simplement nous approcher
ce qu'elles font volontiers. Parfois elles sont si près qu'on peut
les toucher. Mais cela veut aussi dire qu'on peut recevoir le jet
d'eau qu'elles expulsent par leur évent en respirant. Hélène et
moi y avons goûté!
Nous
sommes vraiment émerveillés par le spectacle. Parfois ils y a des
baleines de chaque côté du bateau. On ne sait plus ou regarder.
Et les dizaines et les centaines qui passent à quelques centaines de
mètres, nous les ignorons n'ayant pas assez d'yeux pour tout voir.
Quant à la météo, elle coopère bien et à part quelques petites
averses au début, elle va en s'améliorant : moins de vent et
plus chaud.
Nous
retournons au quai vers 11h30, pleinement satisfaits, contents,
heureux. Nous donnons un bon pourboire au capitaine puis jasons
quelques minutes avec Daniel et Catherine avec qui nous avons échangé
tout au long de notre safari aux baleines. Nous sommes tous d'accord
pour dire qu'il s'agit d'une activité cinq étoiles, de calibre
international. Nous échangeons notre adresse courriels puis ils
prennent la route pour s'en retourner chez eux.
De
retour au VR, nous décidons de changer de site. Nous roulons
environ deux kilomètres sur le chemin de la baie et choisissons un
site très près de l'eau où des centaines de barges, de coulis et
de bécasseaux qui attendent que la marée ne baisse pour se
nourrir. Il y a aussi des pélicans blancs, des bernaches cravants
et des cormorans à aigrettes dont certains arborent de belles
aigrettes blanches.
Nous
décidons de prendre notre repas principal de la journée vers 13h.
Après des morceaux de jicama comme amuses-gueule, je nous fais cuire
des steaks sur un feu de charbon de bois qu'on mange avec des patates
et un reste de ratatouille. Et une petite bière pour célébrer la
St-Valentin!
En
après-midi nous allons prendre une longue marche sur la plage avec
nos jumelles, tant pour voir les oiseaux que pour regarder les
dizaines de dos et de souffles de baleine au loin dans la lagune.
Nous allons aussi voir les quelques sites qui sont situés encore
plus loin que le nôtre et qui surplombent la plage. Ces sites sont
entourés d'étranges petits arbustes épineux, sans feuilles, garnis
de boules de lichens et arborant de jolies petites fleurs rouges.
Assez étrange comme environnement.
Entre
midi et 17h il a fait très beau et chaud mais voici que le ciel
s'assombrit de manière inquiétante à l'est. On voit des éclairs
au loin et cela semble se diriger lentement vers nous. Un
arc-en-ciel apparaît au dessus du désert. Cela ne doit pas être
si fréquent que cela, j'imagine. Du côté ouest, le soleil se
couche en montrant le bout de son nez de temps à autre entre les
gros cumulus qui change de couleur sans arrêt. Quel contraste!
Nous fermons l'auvent et rentrons le matériel lorsque les premières
gouttes de pluie nous tombent dessus. On plaint les voisins de
camping qui campent avec des tentes et qui devront subir la tempête.
Mais finalement, il ne tombe que quelques gouttes sur le camping.
Les gros nuages noirs et menaçants passent au dessus de nous sans
crever. Personne au camping ne s'en plaindra!
Vers
19h nous prenons un léger goûter : Foie de morue sur
biscottes, concombre assaisonné de salsa en polvo El Tajin, goyaves
fraîches et figues mission séchées. Reste la tisane que nous
prenons en vaquant chacun à nos occupations habituelles. Le plus
difficile ce soir, ce fut de jeter plus de la moitié des photos
prises ce matin et de ne garder que les meilleures. Il faut bien le
faire cela sinon on se retrouverait avec 15 000 photos au bout de
cinq mois de voyages.
La
soirée s'achève en allant écouter les cétacés souffler au loin
avant d'aller dormir et rêver de baleines grises, de baleineaux, de
cabrioles et de rencontres du troisième type avec ces géants des
mers.
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